Comment (dé)masquer les émotions?


Öztin Passerat D.

Les masques du discours, İzmir, Türkiye, 12 Ekim 2023 - 14 Şubat 2024

  • Yayın Türü: Bildiri / Yayınlanmadı
  • Basıldığı Şehir: İzmir
  • Basıldığı Ülke: Türkiye
  • Dokuz Eylül Üniversitesi Adresli: Evet

Özet


Les acteurs politiques recourent à toute une gamme de procédés discursifs, énonciatifs et argumentatifs pour convaincre leur électorat. Dans cette optique, d'une part, ils cherchent à argumenter de manière rationnelle afin de rester dans le cadre du politiquement correct, exposant ainsi leurs projets et leur programme. D'autre part, ils adoptent un discours qui peut aller jusqu'aux attaques, voire aux insultes et à la violence verbale, dans le but de discréditer et délégitimer leurs adversaires. La disqualification de l'opposant permet également aux acteurs politiques de polariser la société, renforçant ainsi leur base électorale. Comme dans d'autres pays, dans le contexte politique actuel de la Turquie, où des élections ont eu lieu en mai 2023, les acteurs politiques se sont livrés à des insultes plus que jamais afin de diaboliser l'autre. Des insultes très graves telles que "salope", "bandits", "racaille", "terroriste", ont été entendues.


Etant donné que les insultes sont des énoncés chargés d’émotions, un discours qui expose la violence verbale ou les insultes est transparent. La personne qui exprime ce discours peut paraître plus naturelle et sincère. En ce qui concerne le discours politique, il est plus facile pour les politiciens de s'identifier et de se connecter avec les électeurs. En tenant compte de tout cela, le Président de la République turque, Recep Tayyip Erdoğan, a adopté la violence verbale comme stratégie de discours et l'a utilisée fréquemment, en particulier pendant les périodes électorales.


Parmi les insultes et les violences verbales prononcées par le Président, celle qui a peut-être suscité le plus de réactions et de polémiques est celle prononcée le 1er juin 2022, à l'occasion du 9ème anniversaire des manifestations connues sous le nom des évenements Gezi. Lors de son discours, il a qualifié les femmes participant à ces événements de "sürtük" (salope). Cette insulte est sérieuse et grave, et étant considérée comme un crime selon la constitution, milliers de femmes ont porte plainte contre le Président. Ces réactions suscitent naturellement des émotions allant de la tristesse à la colère et à l'indignation. D'autre part, bien que cette insulte ne soit guère tolérée même par ses partisans les plus fervents, un discours de soutien à cette violence verbale, alimenté plutôt par les trolls a émergé.


Cette étude vise à étudier ces deux discours. En premier lieu, nous analyserons le discours qui est prêt à soutenir ce que dit l’acteur politique, notamment celui largement adopté par les trolls de l'AKP. En deuxième lieu, nous analyserons le discours qui s'oppose au discours de l'acteur politique. Le premier discours, en plus de la colère, manifeste une tendance à augmenter la dose des insultes, tandis que le deuxième discours, s'agissant d'un acteur politique protégé par la loi en tant que président, adopte un ton plus prudent pour éviter tout acte de diffamation. Aussi ont-ils recourt les orateurs des deux discours à des discours implicites ou masqués pour exprimer leurs émotions. Ces masques, qu'ils soient d’ordre lexicaux, discursifs, énonciatifs ou rhétoriques, varient en fonction du type de discours mis en place et du sexe du locuteur/énonciateur.  Dans notre étude, nous chercherons à répondre aux questions suivantes : Quels sont ces masques ? Comment varient-ils en fonction du sexe des locuteurs ?" Le corpus du travail est constitué des réactions suscitées, suite aux discours injurieux, sur les plateformes de médias sociaux Twitter et YouTube.